Créativité et vieillissement
Je vous propose de découvrir le magnifique édito de Bernadette Puijalon à qui nous devons une vidéo récente sur le thème des dérives thérapeutiques telles qu'elles sont proposées aux personnes âgées.
Dans cet édito de la revue "Gérontologie et société" B. Puijalon s'attarde sur les liens qui se tissent entre le vieillissement et la créativité. Pour illustrer le contenu, je ne peux m'empêcher de recopier ici ces quelques mots du philosophe Michel Philibert cité par Puijalon: « Le vieillissement dans notre espèce n’est pas seulement subi, mais toujours aussi rêvé, essayé, conduit, aménagé, interprété et réinterprété »
Quand on parle de vieillissement, la dérive est fréquente de retenir deux pôles, l’un positif, l’autre négatif, de s’enfermer dans un schéma binaire qui oppose vieillissement normal et pathologique, réussi et… raté. Le thème de la créativité n’échappe pas à cette facilité dont on sous-estime trop les effets pervers sur les représentations du vieillir. Relier les mots « créativité » et « vieillesse » amène ainsi traditionnellement à l’esprit l’image d’artistes qui tels Chagall, Oliveira, Hugo, Strauss… ont peint, filmé, écrit, composé jusqu’à leurs derniers jours. En dehors de ces exemples, la créativité est généralement refusée à la vieillesse. L’accent mis sur les génies est d’autant plus fort qu’il s’agit d’opposer l’extraordinaire à l’ordinaire. D’un côté le dynamisme imaginatif et l’élan vital inépuisable pour quelques rares élus, de l’autre la caducité et la déperdition pour Monsieur ou Madame Toutlemonde. Le publicitaire Jacques Séguéla proclamait à qui voulait l’entendre dans les années quatre-vingt-dix, qu’il se retirerait le 1er janvier 2000, jour de ses soixante ans, âge auquel, selon lui, l’homme cesse d’être créatif ! Trop d’expérience briderait l’inventivité et l’audace !Mais, même si l’on reconnaît la créativité d’artistes âgés, cela n’empêche pas les discussions sur la qualité de leurs dernières œuvres. Ainsi, certains critiques louaient, de son vivant, la dernière période de Picasso comme étant celle où, au sommet de son art, il peignait avec une liberté inégalée, quand d’autres se scandalisaient de « l’exhibitionnisme libidineux du vieillard » qui osait, alors qu’il avait dépassé les quatre-vingts ans, continuer à peindre des nus féminins. Il y aurait donc des domaines réservés, des territoires interdits au-delà d’une certaine frontière. Les multiples tabous liés à l’âge, la sexualité, la création… se rencontrant et se renforçant. Il est préférable de retenir l’expression que Gaétan Picon empruntait à Chateaubriand et qui, lorsqu’il analysait les dernières œuvres de Michel-Ange, Poussin, Goya… parlait de « l’admirable tremblement du temps »
Découvrez la suite de l'édito ici: http://www.cairn.info/revue-gerontologie-et-societe-2011-2-page-8.htm
2 Commentaires
Commentaires recommandés